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Heures lorraines

  • les redevances seigneuriales

Les banalités : obligation est faite au paysan de moudre son grain au moulin du seigneur, de cuire son pain au four du seigneur, de faire son vin ou son huile au pressoir du seigneur en payant rubis sur l'ongle les droits de mouture, de fournage et de pressurage. Ces véritables impôts sur la consommation alimentaire pèsent surtout sur les catégories les plus pauvres.

Les péages, les douanes locales qui se rencontrent dans la plupart des seigneuries peuvent se concevoir comme la rémunération des services tels que la construction d'un pont, l'entretien d'une route ; mais leur caractère véritable est bien plutôt celui d'un impôt levé par le seigneur sur tous les passants et ils sont perçus au profit du trésor ducal. On en trouve à Arches, Neufchâteau, Vagney, Dompaire, Saint- Nicolas- de- Port, Saint- Dié, Nancy, Sierck, Latraye. A Arches, pour chaque cheval ou bagage, il est perçu six deniers dont cinq pour le duc et le sixième pour le chapître de Remiremont.

Les péages et les banalités rentrent dans ce que l'on appelle aujourd'hui les impôts indirects. Mais d'autres, plus importants, pèsent directement sur les habitants des campagnes.

Monopole de la pêche et de la chasse : ainsi, le paysan ne peut ni détruire le gibier qui menace ses récoltes, ni s'en nourrir et couvrir ainsi mieux ses besoins alimentaires.

Les corvées : elles consistent en journées de travail que les assujettis donnent gratuitement au seigneur pour l'entretien de son domaine personnel et les besoins de l'administration seigneuriale y compris la réfection et la construction des châteaux-forts. Certaines ont un intérêt commun : aménagement des chemins, construction de digues contre les inondations. D'autres sont agricoles : labourer, sarcler moissonner les terres du seigneur, avec ses propres animaux de trait transporter le fumier, blé, foin, bois...

Le duc Léopold en fit largement usage puisque son service des Ponts et Chaussées fit construire au total huit cent kilomètres de routes et quatre cents ponts. Hommes et bêtes étaient mobilisés pendant plusieurs jours, parfois en pleine période des travaux.

La dîme : levée au profit de l'Eglise : c'est un dixième des produits de la terre.Selon les coutumes, le paysan, au lieu d'une gerbe sur 10, la doit sur 12, 15 ou 20. Mais la dîme porte aussi sur le petit bétail - porcelets et agneaux - sur la laine et le lin, sur le vin et sur les fruits. La dîme est perçue par des agents brutaux : or, le paysan n'a pas le droit de rentrer ses récoltes avant le passage du dîmier.

La taille : varie suivant les facultés du tenancier et les besoins du maître.

Impôts sur les récoltes, impôts sur les successions etc... Cependant cette fiscalité est ressentie différemment par les diverses couches. D'une part, les paysans sans terre ne sont pas imposables : ils n'ont ni terre pour porter des récoltes, ni biens à transmettre à leurs héritiers. D'autre part, les grands fermiers capitalistes semblent n'avoir à payer que des droits féodaux faibles. De même, ils louent parfois des terres "franches de dîmes" et par ailleurs sont souvent des collecteurs, moyennant rétribution de cet impôt.

Par ailleurs, au XVIIIè siècle, les nobles récupèrent une fraction importante des terrains communaux. Or, on a vu quelle importance ces derniers représentent aux yeux de la paysannerie pauvre et des manouvriers.

Main-morte

Les "sujets, hommes et femmes, ayant meubles et héritages... allant de vie à trépas, sans héritiers légitimes en ligne directe... le seigneur prenait, levait et possédait les biens meubles et héritages par manière de morte-main... par quoi les frères, soeurs, proches parents et amis... en restaient frustrés et privés."

Un tel état de servitude n'est avantageux ni pour le paysan, ni pour le seigneur. Sa rigueur favorise les désertions qui amenaient à la dépopulation et à la ruine des villages et comme il fallait bien que la terre soit cultivée, le seigneur avait tout intérêt à ne pas la retirer aux héritiers. C'est ainsi que, à la longue et dans la pratique presque générale, la mainmorte se transformùa en une simple taxe pécunière, quelquefois très légère, que durent payer les héritiers pour rentrer en possession du bien.

Mais toujours cette taxe conserve son caractère primitif de rachat de la servitude car, d'une part, elle frappe chaque héritier et non la succession, et d'autre part elle est fixe et non proportionnelle à la valeur de l'héritage.

"Si tu prends quelque chose à ton vilain en sus des redevances légitimes, dit un jurisconsulte du XIIIè siècle, tu le prends sur le péril de ton âme et comme un brigand; mais entre toi et ton vilain, il n'y a de juge que Dieu."