Heures lorraines
1779 - M. Lallemand - Les duchés de Lorraine, de Bar et les trois Evêchés forment une vaste contrée des plus fertiles de la France ; elle a des forêts immenses et plusieurs salines, des laines, des usines, des mines, quantité de chanvres et d'autres objets de commerce de tout genre. Malgré ces avantages, elle n'en est pas plus opulente : le défaut de communication suffisante avec les provinces et les pays voisins sont les principales causes de la langueur de son commerce. Qu'on ouvre à la Lorraine des débouchés de navigation avec la capitale et les ports du royaume, l'unique cause de la langueur de son commerce venant à cesser, on verra bientôt cette province devenir des plus florissantes et le commerce de la France en général s'accroître par l'établissement de nouvelles relations avec l'Allemagne et la Suisse.
Depuis l'établissement de la monarchie française, il n'a jamais paru de projet plus vaste et plus important à l'agriculture, au commerce et à la marine que celui imaginé par Lucius Verus, général romain, sous le règne de Néron : c'était de joindre la Saône à la Moselle et d'établir la communication de la Méditerranée avec l'Océan par la Hollande et l'Allemagne : la nature semble en effet avoir indiqué cette communication ainsi qu'il va être démontré.
Il existe une source ou petit étang sur une élévation des Vôges entre Xertigny et Raon aux Bois, nommé le Void de Cône qui fournit à la fois des eaux pour la Saône et la Moselle : d'un côté il en sort un ruisseau qui forme la rivière du Côné, où l'on commence à faire flotter des bois au dessous des forges d'Uzemain, à trois lieues de la source et qui se jette dans la Saône près de Corre, au-dessous de Châtillon. Le même étang se décharge à l'Orient dans un ruisseau qui est grossi par plusieurs sources et va deux lieues plus loin se jeter dans la Moselle, à Arches, entre Epinal et Remiremont. Voilà sans doute la jonction de ces deux rivières indiquées. Quant à celle de la Moselle avec la Meuse et de celle-ci avec la Marne, il n'y a aucun obstacle considérable à vaincre : le Maréchal de Vauban en avait jugé l'éxécution facile.
Sous le ministère de M.Turgot, M. de la Galaizière, alors intendant de la Lorraine, fit niveler la pente des ruisseaux depuis l'étang du void de Cône jusqu'à Arches sur Moselle et jusqu'au dessous de la forge d'Uzemain, sur la rivière de Côné, affluent de la Saône. Il s'est trouvé, sur cette longueur de quatre à cinq lieues, cinq à six pieds de pente de chaque côté. On a évalué que la dépense pourrait aller de sept à huit millions ; mais fût-elle de cinquante, les avantages qu'on en retirerait seraient toujours fort au-dessus et même inappréciables, relativement aux débouchés du commerce, aux convois militaires et à l'approvisionnement de la marine.
Le premier et inappréciable avantage qu'il résulterait de l'établissement des canaux et de la jonction des rivières serait d'abord de purifier l'atmosphère, en détruisant le germe pestilentiel ; ensuite, de pouvoir fournir tout le Royaume de sel marin, à un prix modéré et uniforme sans que les revenus du roi en souffrissent, même dans les provinces de Lorraine, des Evêchés, de l'Alsace et de la Franche-Comté, de manière à faire cesser la contrebande. La Saône qui se jette dans le Rhône, dont les eaux paisibles sont très propres à former des matelots, peut devenir d'une grande importance par sa jonction avec la Moselle. La France est obligée d'acheter des bois en grande partie des Hollandais qui se fournissent eux-mêmes dans nos forêts de la Lorraine. On serait surpris du bas prix qu'ils y mettent à cause du défaut de concurrence existant par le manque de débouchés pour nos provinces. (Principes d'un bon gouvernement considéré)
Le Canal de l’Est est construit entre 1874 et 1887 : il relie la Meuse et la Moselle à la Saône (439 km). La voie navigable du canal peut être latérale au Coney ou bien elle emprunte sur divers points le lit de cette rivière canalisée avec barrages mobiles et dérivations éclusées.
Ci-dessous jonction à Fontenoy le Château du Coney avec le Canal de l’Est et une écluse à Uzemain.
Voici ce que dit un paysan vosgien : "Nous ne recevons d'eau de personne, nous en envoyons à tout le monde".