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Heures lorraines

Vers une Lorraine indépendante

La Lorraine est l'enjeu d'une compétition dont l'Empire germanique sort vainqueur. Les empereurs ne pouvant administrer eux-mêmes une conquête aussi éloignée du centre de leurs domaines, en confient la mission à des ducs bénéficiaires. Le duc de Lorraine est d'abord un représentant de l'Empereur : c'est un fonctionnaire.

Plusieurs maisons apparentées se succèdent à la tête du duché : Alsace, Anjou et Vaudémont.

Beaucoup de féodaux, à la faveur des troubles, se sont fortement établis dans leurs terres et ont découpé le pays en seigneuries indépendantes. Cest une vraie déchiqueture de la carte ! La guerre est permanente ; là où se trouvent quatre frères, là se rencontrent presque toujours trois ennemis. La Lorraine n'a pas de capitale. L'autorité ducale ne s'exerce pas sur tout le territoire.

A l'avènement de Gérard d'Alsace la population du duché est divisée en deux classes: les nobles et ceux qui servent les seigneurs soit comme soldats, soit en cultivant leurs champs comme serfs.

La noblesse peut tenir le suzerain en échec par deux privilèges: le droit exclusif de rendre la justice dans les "Assises" et le droit de formuler des décisions générales dans des assemblées ou Etats. Elle seule a la parole dans le pays. Elle est, par exemple, investie du droit de décider des questions relatives à la succession ducale.

Le clergé n'est pas encore un Ordre et ne fait pas contrepoids à la noblesse. Les trois diocèses de Metz, Toul et Verdun qui auraient pu le faire ne dépendent pas des ducs et ont leurs propres territoires, administration et juridiction.

Les institutions de cette époque sont les mêmes en Lorraine comme en France. Les seigneurs lorrains guerroient, joûtent et chassent ; les guerres privées, la famine, la peste sont les fléaux de cette période troublée. Le morcellement politique est extrême.

Les possessions des ducs demandant une administration politique et judiciaire sont organisées en prévôtés puis en bailliages. Au cours des siècles, les ducs élargissent leurs territoires par des conquêtes, mariages.... Ainsi au XIIIè siècle, ils acquièrent le comté de Lunéville ; ils forcent aussi les petits seigneurs à reconnaître leur suzeraineté ; à la Lorraine bientôt ne s'opposent plus que le comté de Bar, quelques seigneureries dans la région allemande et les terres ecclésiastiques de Metz, Toul et Verdun qu'on commençe à appeler les Trois-Evéchés. Ces évêchés comprennent une série de biens disséminés dans tout le duché d'où un inextricable enchevêtrement de terres laïques et ecclésiastiques.

La guerre de la "hottée de pommes"

L'exemple le plus célèbre en est la guerre de la "hottée de pommes". Au XVème siècle, l'abbaye de Saint-Martin-les Metz dépendait du duché de Lorraine et par conséquent était"enclave ducale" dans les terres messines. Or, un jour de septembre 1427, l'abbé de Saint-Martin, qui résidait à Metz, fit cueillir en son jardin une "hottée" de pommes et la fit porter en la cité. Les religieux de Saint-Martin ne tardèrent pas à signaler ce fait aux officiers du duc de Lorraine, lesquels vinrent à Metz demander au nom de leur maître certains droits sur ces fruits, en raison de leur sortie des états de Lorraine pour entrer dans Metz. Les magistrats messins affirmèrent que cela n'était pas compatible avec leurs franchises et refusèrent tout net de payer. De cet incident naquit une guerre que l'on appela pour cela la "guerre de la hottée de pommes". La guerre dura quatre ans avec nombre de villages incendiées, de récoltes et de vignes saccagées.

Première dynastie héréditaire en Lorraine

1048 - Gérard d'Alsace - fondateur de la première dynastie

Le duché de Lorraine va vivre 700 ans malgré ses frontières ouvertes sollicitant la convoitise de ses puissants voisins. Son histoire commence avec Gérard d'Alsace.

L'empereur d'Allemagne donne, par décret impérial, le duché de Lorraine à une nouvelle famille dont Gérard d'Alsace est le représentant. C'est la première dynastie héréditaire de Lorraine.

La Maison d'Alsace, débitrice de sa fortune aux empereurs d'Allemagne, chercha d'abord à s'affranchir de cette suprématie; impuissante pour arriver seule à ce résultat, elle se rapprocha de la Maison de France par des mariages, puis par des traités qui lui permirent d'être aidée dans ses guerres avec ses voisins, l'Allemagne exceptée. Elle a toujours été neutre vis-à-vis de cette dernière. Cela lui valut l'amitié constante de la France et la reconnaissance de l'Allemagne.

Les abbayes possèdent de grands territoires dont la juridiction et l'administration est confiée à des voués souvent des comtes lesquels les représentent dans les assemblées des seigneurs. Les voués,tenus de protéger des abbayes en profitent pour spolier leurs biens et deviennent deviennent maîtres des abbayes dont ils avaient la charge. Cela ne se fit pas sans difficultés et surtout sans résistance de la part des chapîtres qui voyaient à tous moments les ducs empiéter sur leurs droits.

Le fondateur de la Maison d'Alsace, Gérard d'Alsace, est comte de Remiremont et voué des abbayes de Remiremont et de Moyenmoutier. Il s'empare d'une moitié de leur important patrimoine foncier et ainsi occupe une plate-forme de pouvoir importante sur ces terres des Hautes-Vosges.

Le règne de Gérard se perd dans des luttes incessantes pour faire reconnaître l'autorité ducale par les grands du pays. Pendant cinq siècles, les ducs de la maison d'Alsace vont s'efforcer de faire de leurs domaines un tout compact en y annexant comtés et châteaux voisins. Jean de Bayon, religieux dominicain écrit : " C'était un homme d'un vif génie. Nul mieux que lui ne savait enlever par ruse ou par force les châteaux des barons."

Gérard joint aux possessions du duché ses domaines personnels qui comprennent une partie de l'Alsace et de l'archevêché de Trèves, presque toute la Lorraine allemande et de grands biens dans le Saintois et sur la Meuse. Le Saintois, appelé depuis le XIIème siècle Vaudémont, était l'une des parties de l'ancienne province des Leuques.La principale force de Gérard d'Alsace consiste dans les châteaux, les villes, les terres qu'il possède en propre. Bientôt, c'est à ses possessions personnelles qu'est appliqué le terme de Lorraine. Il possède en Lorraine des terres et des châteaux dans les vallées du Madon et de la haute Meuse, avec des résidences à Châtenois et à Vaudémont; des domaines dans la vallée inférieure de la Meurthe et sur la Moselle en amont de Metz, avec Amance et Prény; une grande partie du cours de la Sarre et du comté de Bitche; enfin les voueries des grandes abbayes de Saint-Dié, Moyen-Moutier, Remiremont, Saint-Mihiel, Saint-Evre de Toul, Saint-Pierre-aux-Nonnains de Metz.

En 1070, Gérard d'Alsace s'étant rendu à Remiremont pour y suivre de près les menées des féodaux, meurt subitement, non sans soupçon de poison.

Ses successeurs trouvent dans ses actes un plan tout tracé de la politique à tenir : s'appliquer à augmenter le domaine ducal; contenir la turbulence des nobles; protéger les églises contre le brigandage; se concilier le peuple en les protégeant et préparer la création d'une race moyenne qui fera contrepoids à la race des privilégiés.

Thierry Ier 1070-1115

Fils aîné de Gerard d'Alsace, il lui succède aussitôt de plein droit; mais de même que son père, il ne tarde pas à être inquiété par la noblesse lorraine. De ses adversaires, le plus acharné fut son frère Gérard qui, se disant lésé dans le partage des biens paternels, rassembla des aventuriers et exerça le brigandage dans les campagnes. Le duc, pour l'apaiser lui cède le comté de Saintois (Vaudémont), pays fort riche et peuplé de nombreux villages. Gérard s'y installa comme dans un repaire. Il bâtit sur la montagne de Sion une forteresse presque inexpugnable. Il en sortait pour aller piller les terres voisines et ramener des prisonniers dont il espérait tirer rançon.

Après maintes luttes, on accède aux prétentions de l'ancienne chevalerie, des privilèges sont définis, et sur eux, on base la constitution nouvelle du pays.

1075

L'empereur d'Allemagne fait appel à lui pour lutter contre les Saxons. Le duc acquiert dans cette guerre le surnom de Vaillant, ses troupes sont citées parmi les plus braves et remarquées pour leur discipline.

1076

Canossa

→ Aller à Canossa

C'est sous son règne également que Godefroy de Bouillon prend la tête de la première croisade. Beaucoup de seigneurs lorrains font partie du voyage. Avant le départ de la grande armée, des bandes d'aventuriers qui passaient en avant-garde à travers la Lorraine, pensèrent qu'ils ne pouvaient mieux préluder à la guerre sainte qu'en exterminant, à défaut des Turcs, les plus anciens ennemis du Christ, les juifs. Ils en massacrèrent un grand nombre à Verdun, Metz et autres villes.

Simon Ier 1115-1139

Ces temps sont affreux et n'offrent qu'une succession de violences sanguinaires. C'est pendant son règne que, Henri V, fils de Henri IV empereur d'Allemagne, signe en 1122 avec le pape, Calixte II, le concordat de Worms bientôt ratifié par le concile oecuménique de Latran. La liberté des élections est rendue à l'Eglise et le souverain ne gère que les biens temporels.

A cette époque, Nancy n'est qu'un château fortifié où les ducs avaient l'habitude de séjourner de temps en temps. A côté, s'était formée une petite bourgade qui appartenait aux descendants d'Odelric, frère de Gérard d'Alsace.

Mathieu Ier le Débonnaire 1139-1176

Ce prince débute par commettre des exactions contre les monastères, notamment contre celui de Remiremont. Excommunié par le pape Adrien IV pour ce motif, il tint depuis une conduite opposée et il fonde l'abbaye de Clairlieu où se trouve sa sépulture.On fait l'éloge de la sagesse de ce duc qui s'appliqua à faire régner l'ordre et la justice dans ses états et à y faire fleurir la religion.

Nancy devient capitale. Elle est désormais le centre de l'administration. En 1150, après le décès de Renard, comte de Toul, Mathieu Ier reçoit le comté de Toul et les terres qui en dépendent.

A partir du XIIème siècle, les souverains lorrains deviennent pratiquement indépendants. Leur duché se trouve toujours dans la zone d'influence de l'empire allemand, mais il n'en fait pas partie.

Simon II le Simple 1176-1205

Il aurait bien voulu vivre en paix, mais ce ne fut guère possible. Les difficultés lui viennent de son frère Ferri qui a reçu en apanage le comté de Bitche et qui ne s'en contente pas. L'ambitieux se fait chef de bandits. A la tête d'une troupe d'aventuriers à sa solde, il pille tout le pays et force le pacifique Simon à se mettre en campagne; les routiers sont exterminés et les deux frères sont réconciliés grâce à l'intervention de l'empereur d'Allemagne, Frédéric Barberousse.

Les deux frères s'allient par la suite pour combattre une bande d'aventuriers connus sous le nom de Cotteraux qui dévastait la Lorraine. Ces Cotteraux recevaient l'aide de seigneurs allemands qui venaient prendre part au pillage. La noblesse inquiète accorde au Duc des secours sérieux qui lui permettent de battre les Cottereaux et les Allemands dans les environs de Thionville en 1177.

Simon II fait défense aux seigneurs de ses Etats de se défier et de guerroyer entre eux. Il publie des lois contre les perturbateurs de la paix publique. Pour mettre un dernier sceau à ses entreprises dans l'intérêt général, il ébauche le projet de réunir en un code les coutumes et les lois éparses du pays mais c'est sans compter sur l'obstruction de la noblesse qui regarde comme un abus de pouvoir toute mesure qui les empêche d'user de la force. Sa grande réputation de sagesse l'a rendu l'arbitre de tous les différends soulevés entre ses voisins. Il est enterré l'an 1207, laissant la mémoire d'un prince ferme, juste et pieux.

Ferri Ier dit de Bitche 1205-1206

Le comté de Bitche, possédé déjà par le père de Gérard Ier d'Alsace, est l'un des plus anciens domaines de la Maison de Lorraine et il échoit en apanage à Ferri, fils de Mathieu 1er et frère de Simon II. Peu satisfait néanmoins de l'héritage qui lui est advenu, il inquiéte à diverses reprises le duc de Lorraine; Simon II ayant abdiqué, on ne sait à quelles conditions et d'ailleurs ne laissant pas d'enfants, Ferri de Bitche s'empara du pouvoir qu'il avait tant de fois convoité, mais pour le remettre presque aussitôt à Ferri II, son fils.

Ferri II le Riche 1206-1213

Thiebaut Ier le Bel 1213-1220

Mathieu II le Bégnin 1220-1251

Quand Mathieu 1er meurt en 1176,l'un de ses fils, Mathieu II hérite de son comté de Toul, de sa terre de Fontenoy en particulier.

On reste dans la monotonie des guerres féodales mais le fait le plus marquant est cette date du 1er octobre 1231 : le Duc accorde une charte communale à la ville de Neufchâteau. C'est la première que l'on rencontre dans l'histoire de la Lorraine. Elle porte que chaque année, le jour de la Saint Remy, le 1er octobre, les bourgeois éliront treize magistrats nommés jurés. Ceux-ci choisiront l'un d'entre eux pour être mayeur ou maire. Ils administreront la ville et formeront un tribunal jugeant en dernier ressort les procès entre habitants et les crimes ou délits commis dans la commune.

Le comte de Champagne, à titre de suzerain, confirme la charte et y ajoute un article aux termes duquel les ducs de Lorraine ne pourraient faire arrêter un habitant, ni saisir ses biens sans l'autorisation du tribunal municipal : utile garantie contre l'arbitraire du seigneur.

Un vent de liberté venu de France où se développe la révolution communale, souffle sur la Lorraine.

Dans les derniers temps de son règne, il crée les tabellions pour la bonne rédaction et la conservation des actes; il assure une meilleure distribution de la justice en créant des baillis avec une juridiction déterminée. La Lorraine est divisée en trois bailliages : Nancy (Lorraine proprement dite, Mirecourt (la Vosge) et Vaudremange (Lorraine allemande). Les baillis sont les officiers du Duc. (voir note "féodalité, administration" dans le chapître 8 "féodalité en Lorraine".)

Il fortifie le pouvoir ducal par des acquisitions en achetant les châteaux de Lunéville, Gerbéviller et Valfroicourt. Il amène les habitants de Toul à se mettre sous sa protection pour une redevance annuelle de cent livres.

Ferri III le Chauve 1251-1303

Jusqu'à lui les ducs de Lorraine étaient vassaux de l'Empire de Frédéric Barberousse mais son mariage avec une princesse française, fille du comte de Champagne, lui permet de trouver une aide française contre sa lutte incessante avec les comtes de Bar.

Il saisit dans son administration le sage programme de sa famille qui était de saisir toutes les occasions d'agrandir le domaine ducal. De 1257 à 1301, il acquiert les riches salines de Rosières qui avaient jusque-là appartenu aux familles d'Haussonville, des Beaufremont, des Rosières. Leurs revenus sont pour le trésor royal une ressource de premier ordre.

S'ouvrent alors en Lorraine, les commencements du Tiers-Etat, favorisés par Ferri III, qui s'arme de ce puissant levier politique pour enfin être à la hauteur des rois de France qui usent des mêmes moyens. Les principales villes de ses Etats, Nancy, Neufchâteau, Longwy, etc... reçoivent des lettres d'affranchissement.

Quelle que soit son origine, libre, serf ou colon, il n'y aura plus à le distinguer par là. Tous seront bourgeois, c'est-à-dire libres de leur personne et de leurs biens, à la condition de payer les redevances convenues, comme prix des franchises accordées. Les redevances sont fixes, limitées et quand il s'y sera conformé, le paysan ne devra plus rien et n'aura rien à craindre de la justice des officiers du seigneur. Les juges seront pris parmi les habitants, et leurs fonctions, ordinairement annuelles, vont faire d'eux à la fois les représentants du seigneur et les mandataires de la collectivité des habitants ; et ainsi va se trouver constituée la personnalité civile des communes rurales.

Les communes reçoivent une charte ; les hameaux ont des mayeurs ou maires; les grandes cités établissent chez elles des tribunaux; on régle les assises; et les villes de Montfort, de Châtenoy, de Bruyères, de Longwy, d'Arches, de Frouard, de Dampierre, de Saint-Nicolas, de Nancy, de Lunéville, de Gerbéviller et de Fontenoy-le-Château deviennent libres : en tout dix-neuf localités (1254).

En assurant aux masses opprimées la dignité de la personne humaine et la sécurité du travail, Ferri III jeta les premiers et les plus solides fondements de la prospérité de la Lorraine. Dès lors, on voit la population des campagnes s'accroître, l'agriculture prospérer, le commerce fleurir, les haines de contrée à contrée s'éteindre, l'existence intérieure des familles s'écouler plus douce et plus riche. (voir note "féodalité, administration" dans le chapître 8 "féodalité en Lorraine".)

Il n'y a pas de luttes comme dans certaines parties de la France pour conquérir des droits. L'affranchissement des communes se fait sans qu'une goutte de sang soit répandue ; au reste l'absence d'une population agglomérée, jointe à la misère et à l'ignorance, empêche les paysans d'étendre les concessions qui leur sont octroyées. Ainsi cet affranchissement est loin de signifier une liberté complète, il ne présente guère qu'un adoucissement à l'esclavage ; néanmoins, quelques restreints que soient les privilèges concédés, ils procurent d'incontestables avantages.

L'établissement des communes dans les domaines du prince et leur affranchissement accélèrent le progrès de l'industrie et de l'agriculture. La population augmente. Le besoin de se réunir, pour exercer en commun les privilèges accordés par le duc, favorise les rapprochements ; autour de la maison seigneuriale, chef-lieu du ban, viennent se grouper successivement d'autres habitants. Les affranchissements sont à la fois utiles aux serfs, aux seigneurs et aux ducs : les serfs, une fois libres, fertilisent les terres et les seigneurs ne furent plus obligés de les nourrir. M.Gravier

Les seigneurs lorrains le regardent bientôt Ferri III comme leur ennemi, car faire du bien au peuple, c'est s'attirer l'inimitié des grands.Son libéralisme s'inspire du souci de développer la prospérité de ses Etats et d'abattre l'omnipotence des seigneurs, en se conciliant par les liens de la reconnaissance, les sympathies du peuple. Mais il rencontre devant lui une hostilité générale de la part des seigneurs qui sont presque ses égaux. Comme au temps de Mathieu 1er, la chevalerie complote contre ces généreuses tendances en faveur de la justice et de l'humanité.La noblesse dans son ensemble est profondèment irritée de l'atteinte portée au système qui avait jusqu'alors maintenu la population dans le servage. Des ligues secrètes sont organisées contre un prince dont le libéralisme menace tout l'édifice féodal.

Un jour de l'année 1269 à 1270, le Duc s'attarde dans la forêt qui avoisine Laxou. Comme il revient le soir vers Nancy, il est brusquement entouré par une troupe armée. On lui enveloppe la tête d'un voile épais, puis on l'entraîne en croisant et mêlant les chemins afin de le désorienter et on l'enferme dans le château de Maxéville qui appartient à Andrian des Armoises, le principal auteur de la conjuration. Il y reste longtemps caché à tous les yeux, ignorant où il est et personne n'en ayant de nouvelles. Une nuit, souffle une violente tempête qui enlève le toit de la tour. Un ouvrier monté pour réparer le dommage se met à chanter une sorte de complainte populaire qui raconte la disparition du prince, parti pour chercher aventure de guerre ou d'amour. Ferri questionne le couvreur, le gagne par des promesses et lui remet son anneau en le chargeant de prévenir la duchesse. Marguerite de Champagne se confie à un gentilhomme fidèle nommé Dillon; ils prennent dix cavaliers, investissent la tour de Maxéville et délivrent le Duc.

Ferri III, sans se décourager, continue bravement la lutte contre la noblesse. Il lui porte un coup terrible en décrétant que les arrêts de la juridiction des assises ne seraient exécutoires qu'après ratification du prince alors qu'auparavant, les assises formait une cour souveraine sans appel au dessus du pouvoir ducal.

Quant à la politique extérieure, un coup fatal en 1301 est porté au comté de Bar,qui, jusqu'alors indépendant,suite à un conflit avec le roi de France se retrouve pour moitié vassal de celui-ci. Le roi de France, de ce fait, a un pied durable en Lorraine, ce qui représente une menace pour les patriotes lorrains.

Thiebaut II le Libéral 1303-1312

Il continue comme son père et s'attache à affaiblir la chevalerie. De plus en plus, il se sent attiré par la France d'autant plus qu'il avait reçu en dot les villes de Lorraine qui relevaient de la Champagne, autant dire de la France : Neufchâteau, Châtenois, Montfort, Frouard. Le roi de France Philippe IV semble le prendre en grande amitié ce qui n'empêcha pas ce roi si paternel de préparer un plan pour s'emparer de la Lorraine.

Thiebaut vise le pouvoir absolu et interdit les guerres privées : "à tous chacuns nobles, ayant chastelet ou fief, d'armer ost et faire ordre de guerroyer, sous quelque prétexte que ce soit, sans que le duc l'ait permis", ce dont furent "les gentilshommes lorrains grandement esbahis et courroucés".

Les seigneurs irrités se liguent et entrent en campagne. Thiebaut est vainqueur, bannit les plus dangereux et demantèle leurs châteaux.

Une autre affaire lui cause de graves soucis: celle du procès des Templiers. Ces religieux-soldats avaient de nombreuses commanderies en Lorraine. Ils sont poursuivis comme en France. Après la suppression de l'ordre, les chevaliers sont bannis et leurs biens distribués aux Hospitaliers et à d'autres maisons religieuses. Quelques chevaliers s'étaient réfugiés dans la commanderie de Brouvelieures, perdue au milieu des Vosges, espérant y rester cachés. Mais une nuit la population du voisinage assaillit cet asile, massacra les chevaliers, pilla la maison et la rasa jusqu'au sol. (1313)

Ferri IV 1312-1328

Durant cette période, les souverains de Bar comme ceux de la Lorraine deviennent les soldats de la France, la suivent et se dévouent jusqu'à mourir pour elle. La Lorraine n'est plus en Lorraine, elle est toute entière soit à Paris, soit sur les champs de bataille français.

Sous son règne, les laboureurs sont mis sous la protection du droit commun. Quoique serfs, on ne put, comme auparavant, les traîner en prison, ni saisir leurs bestiaux et leurs ustensiles aratoires, pour répondre des dettes de leurs seigneurs.

Raoul Ier le Vaillant 1328-1346

Il s'occupe à faire fleurir en Lorraine le commerce naissant. Des foires franches s'établissent à Saint-Nicolas, à l'imitation de celles de Champagne, si célèbres autrefois. Les marchands se constituent une justice consulaire.

La postérité le surnomme le Vaillant.Il cherche un appui auprès de la France et combat à ses côtés. Il est tué dans les rangs français à la bataille de Crecy en 1346 ; Son corps est ramené et enterré dans l'église de l'abbaye de Beaupré, près de Lunéville. Son épitaphe dit que nul ne fut trouvé plus avancé dans les rangs des Anglais.

Jean Ier Dieudonné 1346-1390

Fils de Raoul,trop jeune pour régner par lui-même, il gouverne sous la tutelle de sa mère, Marie de Blois.

La Lorraine souffre de la peste noire qui désole l'Europe entière peu après Crécy. Les excès des fanatiques flagellants lui font également beaucoup de mal.

Après avoir guerroyé auprès de Bertrand du Guesclin et avoir été fait prisonnier, il rentre dans son duché de Lorraine en 1364.

Tout le pays est à feu et à sang. Les féodaux se pillent les uns les autres. Les soldats, après la signature de différents traités, sont licenciés. Habitués à vivre de rapines, ils refusent de se séparer et forment les grandes compagnies qui, à l'exemple des anciens routiers, se mettent à vivre sur le pays. Les seigneurs n'ont aucun scrupule à les prendre à leur solde pour venger leurs querelles personnelles. Les routiers sont au nombre de 40 000. Ils ravagent le Barrois, menacent l'évêque de Metz et envahissent l'Alsace. L'empereur d'Allemagne les menaçant, ils rentrent à nouveau en Lorraine et ce n'est qu'en 1368 qu'ils quittent la Lorraine.

Jean Ier favorise le mieux qu'il peut l'extension des franchises de Beaumont.

Charles II le Hardi 1390-1431

1412-1431- Jeanne d'Arc

C'est la fille de laboureurs aisés de Domremy, près de Neufchâteau. Très pieuse, elle affirme avoir entendu des voix de plusieurs saints qui lui donnent la mission de délivrer la France de l'occupation anglaise. Elle parvient à se rendre à Chinon en mars 1429 et à convaincre les personnages influents de la cour et le Roi. La délivrance d'Orléans, les victoires de Beaugency et de Patay, le sacre de Charles VII à Reims, sa capture et son procès constituent les principales étapes de sa vie publique. Elle est brûlée par les Anglais, à Rouen, le 30 mai 1431. Elle donne l'élan qui permet aux troupes royales de chasser de France, quelques années plus tard, les envahisseurs anglais.

On voit apparaître le gruyer (de l'allemand "grün à cause de son habit vert). Cet officier s'occupe exclusivement des forêts, étangs et rivières.

René 1er d'Anjou, le magnanime 1431-1453

La maison d'Anjou interrompt la filiation directe de la descendance de Gérard d'Alsace.

Le 30 janvier 1431 René d'Anjou et sa femme, la duchesse Isabelle, remettent aux gentilshommes de la noblesse une déclaration signée de leurs deux noms qui rétablit la chevalerie dans tous ses droits traditionnels, notamment la juridiction des Assises. Cet acte fait reculer de plus de cent ans le pouvoir central.

Jean II d'Anjou et de Calabre, le Subtil 1453-1470

En 1453 s'écroule avec un immense retentissement, sous les coups de Mahomet II, l'empire d'Orient. Cette date ferme pour l'Europe la période historique dite du Moyen Âge.

Jean II obtient du roi Louis XI sa renonciation à la suzeraineté sur les villes de Neufchâteau, Châtenois, Frouard, Montfort et Passavant. Louis XI parait se désintéresser tout à fait de la Lorraine. Il se désiste de tous ses droits sur la ville d'Epinal qui vingt ans auparavant s'était donnée à la France pour échapper à l'évêque de Metz, et désigne comme souverain, Thiébault de Neufchâtel, maréchal de Bourgogne et déjà propriétaire de plusieurs domaines en Lorraine. Les habitants refusent ce nouveau maître. Thiébault de Neufchâtel vient les assiéger. Ils résistent vaillamment et Louis XI les autorise à choisir un seigneur à leur convenance. Ils choisissent le duc de Lorraine en 1466.

Nicolas d'Anjou, le Plaisant 1470-1473

Le jeune fils de Jean II vit à Paris. Il est encore moins Lorrain de coeur et d'esprit que son père et son grand-père. On a beaucoup de peine à le faire venir à Nancy prendre possession de son duché.

René II le Victorieux 1473-1508

Privé de son père, en 1416 René a sept ans. Il est pris en affection par son grand-oncle le cardinal Louis de Bar, évêque de Verdun. En 1419, celui-ci en fait son héritier et lui donne le duché de Bar.

Il se trouve à son avènement en 1473 à lutter contre les convoitises de deux puissants voisins, le roi de France Louis XI et le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire. C'est de son règne que date le sentiment patriotique des Lorrains.

→ Charles le Téméraire

René II a trente sept ans. Mûri par l'âge et par de dures expériences, il renonce à ses espoirs de conquête et est assez sage pour ne donner ses soins qu'à une politique vraiment lorraine. Au lieu de gaspiller son génie et ses ressources dans des entreprises irréalisables, il fortifie dans son pays l'unité et la cohésion qui en font maintenant une véritable nation capable de défendre son indépendance. La cause principale de la faiblesse de la Lorraine est la constitution séparée et indépendante des trois évêchés Metz, Toul et Verdun. Les bourgeois, depuis longtemps affranchis se sont formés en véritables républiques, très jalouses de leur indépendance et sachant se défendre contre toute tentative de mettre la main sur les sièges épiscopaux et les domaines qui en relevaient.

Il parvient en quelques années à réparer les maux de la guerre. Il purge le pays des aventuriers laissés sur les routes par le passage des Bourguignons et des mercenaires. Il rend la sécurité à l'agriculture et au commerce. Il relève les villages incendiés. Il rebâtit les forteresses démantelées ou tombées en ruines. Il fait de Nancy une vraie capitale, reconstruit les murailles, fortifie les deux portes de Saint Nicolas et de la Craffe. Il pave entièrement la ville 150 ans avant que Louis XIV ne pavât Paris. Il rebâtit le palais ducal et élève à ses côtés le couvent et l'église des Cordeliers où devaient reposer les cendres des souverains. C'est à lui qu'on doit le pont qui joint Nancy à Malzéville. Il décore la place Saint Epvre d'une belle fontaine sur laquelle on voit aujourd'hui sa statue.

C'est sous son règne,vers 1505, qu'on vit descendre pour la première fois des montagnes de la Vôge, sur les rivières qui en découlent, les flottes ou radeaux de planches et bois de sapin, que depuis on conduisit si loin et qui devait devenir l'objet du plus grand commerce en Lorraine.

Dans cette période beaucoup de concessions de terrains ont été faites, à charge de redevances en deniers ou en denrées, sous la forme d'ascensements ou admodiations à long terme.

Il se livre au plaisir de la chasse aux loups. Chaque fois qu'il tue un loup, il dit qu'il sauve la vie à 10 paysans.Il meurt au château de Fains le 10 octobre 1508 : il a été surnommé "le Magnanime".

Antoine le Bon 1508-1544

Nous sommes au XVIè siècle. Une ère nouvelle s'ouvre. De grands faits transforment le monde : l'invention de l'imprimerie, la découverte du nouveau monde, les guerres d'Italie, la Renaissance des arts et des lettres, la Réforme protestante, les luttes pour l'équilibre européen, l'écroulement du système féodal, changent la face de l'Europe. C'est l'histoire moderne qui commence.

En ce moment, la nationalité lorraine est définitivement constituée. Ce n'est qu'un petit peuple entre les deux colosses qui se dressent à ses côtés. Mais son histoire se mêle forcèment à l'histoire générale tout en gardant assez d'indépendance pour avoir sa propre histoire.

Antoine, fils de René II a été élevé à la cour de France depuis l'âge de sept à huit ans. Louis XII l'a en grande affection.

Après avoir guerroyé auprès des Français et suivi le roi de France dans ses campagnes, surpris par une maladie grave, il rentre dans ses états en 1510, essaie de rétablir la paix entre tous les féodaux et de réformer la justice. Il participe en 1515 à la bataille de Marignan et vit dans une familiarité fraternelle avec François Ier.

Martin Luther en prêchant la "liberté chrétienne" avait entendu rester dans les domaines de la conscience et de se borner à la réforme des abus de l'Eglise. Mais il est bientôt dépassé par des prédicants plus hardis qui ne craignent pas de toucher aux bases mêmes de l'ordre politique. Les princes sont les alliés de Luther et appliquent ses doctrines à leur manière en sécularisant à leur profit les riches domaines de l'Eglise. La secte des Anabaptistes alla plus loin encore et, faisant appel à la masse des opprimés, soulève les paysans contre les abus de la féodalité. Des hordes venues de la Forêt Noire déferlent sur la France. Ce sont les Rustauds. Il brûlent les châteaux, les églises, les monastères, massacrent les défenseurs du régime exécré. Luther s'élève avec force contre leurs excès et engage les princes à réunir toutes leurs forces pour étouffer dans le sang cette nouvelle jacquerie. Cent mille paysans sont exterminés.

Le mouvement insurrectionnel continue sa marche. Les bandes mutilées se portent vers le Rhin, franchissent le fleuve et se répandent en Alsace. De Bâle à Wissembourg les paysans se lèvent. En peu de temps trente mille hommes se trouvent réunis près de Sainte-Odile et jurent de ne déposer les armes qu'après avoir anéanti toutes les oppressions et tous les abus. Ils prennent pour chefs deux bourgeois Georges Ittel de Rosheim et Erasme Gerber de Molsheim, qui organisent leurs forces. Leurs revendications sont en apparence modérées mais la propagande est faite par les violents. Les Rustauds égorgent les prêtres, les moines, les nobles, les bourgeois riches et tous ceux qui refusent de suivre l'insurrection. Les églises, les couvents, les châteaux qu'on peut forcer sont incendiés et dévastés. Les insurgés s'emparent de Saverne dont ils font leur place d'armes, ils pillent plusieurs abbayes, entre autres celle de Marmoutier. Ils annoncent hautement qu'ils vont envahir la Lorraine et iraient ensuite soulever les paysans de France. Déjà ils pénètrent dans les terres de Salm, de Créange, de Sarrebourg, de Bitche.

Antoine va vers la frontière avec quinze à seize mille hommes. Il s'avance vers Sarrebourg qui lui appartient. Antoine décide de marcher sur Saverne et arrête leur avance en 1525. Malgré la non implication de Luther dans ce conflit qui était plutôt une "jacquerie sociale", les luthériens sont assimilés à cette rebellion si bien que la Réforme ne prend pas en Lorraine qui reste en presque totalité catholique.

La paix règne en Lorraine car le duc Antoine ne prend pas part aux luttes incessantes entre Charles-Quint et François 1er.

1542 - C'est un duché indépendant reconnu tel par le traité de Nuremberg de 1542. L'empereur d'Allemagne, Charles Quint renonce à sa suzeraineté sur les ducs de Lorraine qui deviennent ainsi des souverains autonomes ; c'est un duché libre qui ne peut en aucun cas, même en l'absence d'héritier, être incorporé à l'Empire. Le duc de Lorraine devient un souverain comme le roi de France ou l'Empereur. Au moment même où cette indépendance est déclarée, la Lorraine est de plus en plus attirée par la France. Des trois baillages entre lesquels elle se divise, deux, Nancy et Vosges, sont des pays entièrement de langue française. La cour de Nancy est cour française.

François le Grand 1544-1545

Il décède un an après sa prise de pouvoir, victime d'une attaque d'apoplexie.

Charles III le Grand 1545-1608

Son règne est le plus long et le plus prospère de l'histoire de la Lorraine.

1552 - La France occupe les trois évêchés de Metz, Toul et Verdun.

Avant Charles III, les ducs de Lorraine ont fait leur capital du métier de la guerre mais voulant être le père de son peuple, il fait son métier de le policer et d'enrichir ses Etats dans la paix par les arts et le commerce.

Il réforme les lois : dès 1571, il procède à une enquête générale, fait rassembler les textes, confronte les usages et coutumes qui variaient d'un pays à l'autre, en garde les meilleurs éléments et fonde une unité législative. Il dote la Lorraine d'un recueil qui assure une bonne administration de la justice. Toutefois, il laisse subsister dans sa législation les procès criminels pour fait de sorcellerie. Son procureur général, Nicolas Remy, se vante dans son livre de la "Démonolâtrie" d'avoir, en l'espace de quinze ans, fait brûler 900 sorciers. On l'a comparé à Torquemada. Il faisait placer les enfants des suppliciés autour des bûchers en flamme, où, mis tout nus, ils étaient frappés de verges. Ceux qui estiment, disait-il, que dans ce genre d'accusation il faut avoir pitié de l'âge, du sexe, de la simplicité ou de la séduction, sont des insensés et je les maudis."

Nicolas Remy n'est pas le seul coupable : c'est le crime du temps. L'aveuglement est général. La peur des sorciers justifie toute les barbaries. Toutefois, ce qui est incompréhensible, c'est que sous le grand et sage Charles III, ces scènes d'horreur et de folie aient pu couvrir toute le Lorraine.

→ Sorcellerie en Lorraine

On doit à ce duc la fondation de la célèbre université de Pont-à-Mousson, la création de nombreux hospices, le maintien de la religion catholique dans ses états à la Ligue dont les chefs étaient les Guise.

Charles III s'occupe de l'entretien des pauvres. Les secours de l'église ne suffisent plus. Il ordonne qu'on fasse sortir de ses états tous les pauvres étrangers. Il ordonne en 1582 à toutes les communautés de nourrir leurs pauvres afin de les empêcher de mendier. Il s'occupe activement de l'administration de ses états.

De son temps, le commencement de l'année était incertain : on le fixait à Noël ou à Pâques ou au 25 mars; par son édit du 15 novembre 1579, l'année commence au 1er janvier: le calendrier grégorien est introduit en Lorraine.

Les populations sont nombreuses et fortes parce que les moeurs sont pures et la nourriture saine et abondante ; la justice est bien exercée, les bois conservés, les domaines bien administrés, l'impôt léger. Il y a sûreté au dehors, tranquillité et abondance au dedans. Les peuples sont heureux et presque tous ont de petites possessions bien cultivées qui les attachent et les affectionnent au sol. Il n'y a pas d'émigration dans ces temps.

Charles III meurt en pleine gloire et très populaire. On lui fait de magnifiques funérailles. C'était un dicton populaire en Europe que les trois plus belles cérémonies qu'on pouvaient voir étaient : le couronnement d'un empereur à Francfort, le sacre d'un roi de France à Reims et l'enterrement d'un duc de Lorraine à Nancy.

Henri II 1608-1624

Ce prince a un penchant irrésistible à répandre ses dons. Il se fait chérir du peuple, de la noblesse et surtout du clergé qui a la plus grande part dans ses libéralités. " On a blâmé ma libéralité, dit ce duc, il en viendra d'autres après moi qui ne me ressembleront pas, et l'on verra ceux qui auront le mieux gouverné!"

Rien ne change dans les relations de la Lorraine avec la France. Le roi et le Duc semblent unis par une sincère amitié mais dans l'esprit d'Henri IV, roi de France, mûrit toujours le dessein de disloquer la maison d'Autriche et pour ce faire, il faut passer par la Lorraine. On parle alors de marier plus tard la princesse Nicole ( 3 ans), fille du Duc avec le dauphin (8 ans, futur Louis XIII). Nicole avait aussi été promise à un infant d'Espagne mais aussi au fils du comte de Vaudémont, frère du duc. Tout cet imbroglio prend fin avec la mort d'Henri IV assassiné par Ravaillac. La mort du duc en 1624 laisse le trône à Nicole et Charles de Vaudémont.

Charles IV - la Lorraine à feu et à sang

Henri II, son oncle s'est plusieurs fois écrié: "Ce jeune étourdi perdra tout". Cette prophétie s'est malheureusement réalisée.

Avec Charles IV, prochain duc de Lorraine, la guerre se profile aux confins du Duché et les ambitions françaises vont bientôt mettre en péril le devenir de la Lorraine en tant qu'état souverain.

Au moment où Charles IV prend une résolution où il va risquer sa couronne et son peuple, la Lorraine est un des pays les plus prospères de l'Europe; sur un territoire accru par de récentes acquisitions, une population énergique et brave, fière de sa nationalité, laborieuse, doublée par quatre-vingts ans d'une paix profonde, vit heureuse et satisfaite. L'agriculture, aussi développée que le permet le servage, l'industrie dont certains produits étaient recherchés au loin, le commerce dont un système complet de routes, de foires et de marchés sollicitent l'activité, répandent dans toutes les classes, l'aisance et la richesse. La petite cour ducale rivalisait en pompe, en luxe, en élégance avec la cour de France.